Remorquage dans la tempête

Jeudi 22 février 2024 - Par une météo exécrable, un bateau de pêche tombe en panne à 15 miles au sud de Belle-Île…

Après un arrêt d'un mois de la pêche dans le Golfe de Gascogne, les pêcheurs, qui ont enfin pu reprendre la mer, sont sorti malgré une météo difficile.
Un fileyeur d'Arcachon, au travail à une quinzaine de miles (environ 28 km) au sud de Belle-Île, tombe en panne d'hydraulique. Le bateau n'est plus manœuvrant et demande assistance. Le CROSS Étel déclenche le canot de Belle-Île.

8h47, après quelques préparatifs, le canot appareille. 5 miles au calme jusqu'à la pointe de Kerdonis, puis 15 miles dans une mer très forte qui nous oblige à réduire l'allure.

10h22, nous sommes en vue du bateau qui roule bord sur bord. Approche prudente… et la remorque est passée !
Compte tenu des conditions de mer et de la taille du remorqué – 18 mètres, une prise au vent importante et environ 4 fois le poids du canot –, la remorque est allongée au maximum et le remorquage commence… mais n'ayant plus de barre, le fileyeur désemparé part dans un sens, puis dans un autre, au gré du vent et surtout des coups de mer. La « patte d'oie » (aussière en V au bout de la remorque, qui permet de répartir la traction sur 2 points d'ancrage sur le bateau remorqué), trop sollicitée, casse au bout de quelques minutes.

Nouvelle manœuvre délicate et nouvelle approche dans le chaos. La remorque est repassée, en direct cette fois. Pour lui donner un peu plus d'amorti, elle est lestée d'un pneu d'une vingtaine de kilos et d'un ballon. À 10h50, le remorquage recommence.
Nous demandons au pêcheur de mettre sa barre à 0, ce qui améliore bien la trajectoire du bateau. Le remorquage commence plutôt bien, mais le temps fraîchit encore – jusqu'à 8,50 m de creux et 127 km/h de vent relevés au sud de Belle-Île –, et la barre n'étant pas bloquée, le bateau repart dans tous les sens. Impossible de suivre notre cap, nous sommes entraînés de plus en plus à l'est.
En fonction des coups de mer, notre remorqué nous retient, la tension sur la remorque est alors telle qu'elle qu'elle commence à fondre sur le point de contact avec la bitte de remorquage, ou il nous rattrape par le travers, au risque de nous faire chavirer.
Après un beau grain et 40 minutes de bataille, la difficile décision est prise de couper le remorque. Trop dangereux.

Nous restons près d'une heure autour du pêcheur, le temps qu'il mette en place son mouillage et d'être sûr que son ancre croche bien. Le bateau étant, certes, dans une situation assez inconfortable, mais hors de danger, liberté de manœuvre nous est rendue et nous repartons pour Belle-Île où nous arrivons à 13h45.
Il nous faut maintenant remplacer la remorque de 200 m que nous avons perdue, ce qui est fait dès notre arrivée pour permettre au canot de rester opérationnel.

Notre fileyeur laissé au mouillage a été pris en remorque dans l'après-midi par un chalutier, plus puissant et surtout plus massif que notre canot, qui rentrait à La Turballe. Tout se termine bien.

À notre arrivée, approche du fileyeur à la dérive.La remorque est passée, le remorquage commence dans une mer bien agitée.Selon les coups de mer, le bateau nous rattrape…… ou il nous retient. La tension de la remorque est terrible.Le canot est rattrapé par de véritables murs d'eau…… derrière lesquels se cache notre fileyeur…… jusqu'à complètement disparaître.Pendant le grain… le bateau n'en fait qu'à sa tête.

Bilan : un bateau de pêche secouru, mais que nous avons dû abandonner au mouillage pour ne pas risquer de sur-accident.

Équipage : Charles Roussette, Philippe Enhart, Pierre-Yves Brière, Pierre Mouty, Elouan Rousselot, Antoine Samzun.